Proposition de loi sur le fonctionnement des réseaux de soins créés par les mutuelles
Mercredi 24 juillet 2013
Monsieur le Président,
Monsieur le Ministre,
Mes cher(e)s collègues,
En 2008, 15,4 % de la population adulte déclarait avoir renoncé à des soins médicaux pour des raisons financières au cours des douze derniers mois. Ces renoncements concernent en premier lieu les soins dentaires et optiques pour lesquels la part des dépenses remboursées par l’assurance maladie obligatoire est plus faible : 4 % pour les dépenses d’optique, les complémentaires santés en prenant en charge 66 % et les ménages 29 % en moyenne. Selon une étude sur le secteur de la distribution des lunettes, les marges bénéficiaires des opticiens s’élèveraient à 233 % ! En France, le prix de vente est 50 % plus élevé que dans les autres pays européens. Cette situation n’est pas normale. En raison d’une prise en charge insuffisante des frais d’optique, et malgré une mutuelle, certains patients sont dans l’impossibilité de s’équiper afin de corriger leur handicap. De plus, le surcoût n’est pas justifié par un service de meilleure qualité comme le démontrent les sondages effectués à la demande de la Commission européenne en 2011.
Ainsi, les secteurs de l’optique, du dentaire et de l’audioprothèse sont très peu remboursés et les tarifs varient d’un territoire à un autre. Il est donc indispensable de réguler le système de santé dans ces secteurs. Il apparait légitime, et au nom de la solidarité, que les mutuelles puissent proposer à leurs adhérents de diminuer le reste à charge.
Nous devons réguler ce secteur, et éviter ainsi une économie de la rente pour certains professionnels qui ajustent leurs tarifs sur le niveau de remboursement.
Le texte de loi que nous examinons, aujourd’hui, permettra de faciliter l’accès à des soins de qualité pour le plus grand nombre. En effet, son objectif est double :
– favoriser une régulation des coûts de santé en vue de maîtriser les restes à charge pour les ménages et le montant des cotisations des complémentaires santé, évitant ainsi des démutualisations.
– améliorer la qualité de l’offre à travers les engagements pris par les professionnels de santé au sein des réseaux ainsi constitués.
Il s’agit, ici, de combler un vide juridique c’est-à-dire de sécuriser juridiquement les réseaux de soins qui existent depuis une vingtaine d’année afin de rétablir une véritable égalité entre les organismes complémentaires en modifiant le Code de la mutualité. Ce texte permettra aux mutuelles de jouer pleinement leur rôle de régulateur du secteur en leur donnant la possibilité d’être des acteurs de la négociation entre l’offre et la demande de soins.
Par ailleurs, je rappelle que ce texte répond à une demande exprimée par plusieurs instances publiques : la Cour des comptes, l’Inspection générale des finances (IGF), l’Inspection générale des affaires sociales (Igas), l’Autorité de la concurrence, ont toutes plaidé pour l’ouverture à tous les organismes complémentaires de la possibilité de constituer des réseaux de soins.
De plus, légaliser les réseaux de soins mis en place par les mutuelles est aussi un des engagements de campagne de François Hollande. Il est important pour le Président de la République de rétablir l’égalité entre les assurances et les mutuelles afin de favoriser les conditions d’un meilleur accès de tous à des soins de qualité et au meilleur coût. On ne peut que s’en féliciter. En effet, l’absence de régulation provoque des distorsions de prix significatives entre les mêmes prestations.
Il est nécessaire et urgent pour nos concitoyens de réguler et je tiens à préciser que la liberté du choix du professionnel de santé reste entière pour tout adhérent d’une mutuelle. Quel que soit le professionnel choisi, au sein d’un réseau ou non, il conserve le remboursement de sa mutuelle. Mais il pourra être mieux remboursé s’il accepte de se rendre chez un professionnel conventionné par sa mutuelle. Tous les professionnels peuvent entrer dans les réseaux de soins. Contrairement aux idées reçues, ils ne sont pas réservés aux grandes enseignes et ne défavorisent pas les petits opticiens indépendants à condition qu’ils remplissent des critères de prix et de qualité. Le conventionnement assure en retour aux professionnels de santé plus de patients.
Il est primordial que tous les salariés puissent avoir une mutuelle. Il était important que ce texte soit présenté au plus vite au parlement car la loi sur la sécurisation de l’emploi, votée dernièrement, prévoit l’obligation pour les entreprises de garantir une mutuelle à leurs salariés. C’est dans l’article 1er. Actuellement, des négociations sont ouvertes dans ce sens par les différentes branches professionnelles. Les entreprises auront la liberté de retenir le ou les organismes de leur choix. Ainsi avec l’adoption de l’ANI, on risque de voir des entreprises se diriger vers les organismes de prévoyance et vers ceux dépendant du code des assurances qui ont mis en place des réseaux de soins à la défaveur des mutuelles. Le risque est de voir le réseau des mutuelles fortement amenuisé. Les mutuelles ne doivent pas être injustement écartées du dispositif.
Le texte qui nous ai présenté aujourd’hui est non seulement une nécessité, mais permettra d’améliorer le fonctionnement des réseaux quel que soient leurs statuts, mutualistes ou non.
Je me réjouis de ce texte car il va directement changer la vie quotidienne de nos concitoyens, notamment de ceux qui renoncent à se soigner parce qu’ils n’ont pas assez d’argent. Il s’agit de permettre l’accès de tous à une santé de qualité. Il est donc juste que le législateur permette la régulation des prix pratiqués. Nous ne devons pas tomber dans un débat qui oppose la logique économique à une logique de santé et d’accès aux soins.
Il y a eu déjà beaucoup trop de dérives et il est de notre responsabilité de poser des règles et des principes.
Je vous remercie.