Dioxyde de titane dans les crèmes solaires (réponse à une question)
Mme Patricia Schillinger attire l’attention de Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes sur les risques du dioxyde de titane. En effet, ce denier est un pigment entrant dans la composition de nombreux produits d’usage courant aussi bien dans les crèmes solaires, les dentifrices, les confiseries que dans les peintures et les médicaments. Le dioxyde de titane (E171 sur les étiquettes) est listé comme colorant au standard international du Codex alimantarius. Il peut, selon ce classement, être incorporé dans une large gamme d’aliments et sans limite de dosage. Selon le site « openfoodfacts.org », on en trouve dans plus de 81 produits alimentaires. Avec le dioxyde de titane, on se retrouve dans la même situation qu’avec l’amiante il y a quarante ans, affirme le professeur Jürg Tschopp, prix « Louis-Jeantet » de médecine 2008, qui a piloté une étude franco-suisse sur les effets toxiques de ce nanomatériau. Les tests « in vivo » et « in vitro » sur des souris, et « in vitro » sur des cellules humaines, montrent que le dioxyde de titane, sous forme nanométrique (particules de dimensions un million de fois plus petites qu’un cheveu), a une activité pro-inflammatoire sur les poumons et le péritoine. D’où un possible effet cancérigène. Tout comme l’amiante et la silice, deux irritants environnementaux bien connus, ce nanomatériau peut être absorbé par voie digestive, cutanée ou respiratoire. Aujourd’hui, on manque encore de données sur l’absorption de dioxyde de titane via l’alimentation ou la peau. Plus de deux millions de tonnes de dioxyde de titane nanométriques sont produites chaque année dans le monde, un chiffre qui a doublé en moins de dix ans. Par conséquent, elle souhaiterait connaître la position du Gouvernement sur le sujet et savoir s’il entend interdire le dioxyde de titane au nom du principe de précaution.
Réponse de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé
À publier le : 24/11/2016, page 5088
Texte de la réponse : Les nanomatériaux – substances à l’échelle du milliardième de mètre – présentent des propriétés différentes de celles des substances chimiques « conventionnelles », ce qui peut se traduire par une toxicité potentielle plus importante du fait de leur taille et de leur capacité de pénétration dans l’organisme. Les pouvoirs publics sont très attentifs à l’évaluation des risques sanitaires liés aux nanomatériaux, notamment au dioxyde de titane. En effet, ce dernier a été classé comme agent cancérogène possible pour l’homme (2B) par le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) en 2006. En parallèle de l’amélioration des connaissances, la France a souhaité renforcer la traçabilité des nanomatériaux et la disponibilité de l’information à cet égard. Elle est ainsi le premier pays européen à avoir mis en œuvre un dispositif de déclaration obligatoire des nanomatériaux, visant à déclarer les usages ainsi que les quantités annuelles produites, importées et distribuées sur le territoire français. Les ministres chargées de la santé et de l’environnement ont également inscrit plusieurs actions relatives aux nanomatériaux dans le 3ème Plan national santé environnement (PNSE3), comme par exemple l’évaluation de l’exposition à ces matériaux dans les denrées alimentaires, pour lesquelles le dioxyde de titane est utilisé. Une saisine de l’ANSES ayant pour objectif de renforcer les connaissances disponibles relatives aux effets potentiels sur la santé des nanomatériaux contenus dans les denrées alimentaires et les matériaux à leur contact, est en cours. Dans le PNSE3, le Gouvernement agit en faveur de l’élargissement du dispositif d’étiquetage à d’autres produits contenant des nanomatériaux que les produits cosmétiques, les produits biocides et les denrées alimentaires, notamment dans le cadre du règlement européen n° 1272/2008 relatif à la classification, à l’étiquetage et à l’emballage des substances et des mélanges (CLP). La Commission européenne œuvre également à adapter le règlement sur l’enregistrement, l’évaluation, l’autorisation et les restrictions des substances chimiques (règlement REACH) pour une meilleure prise en compte des nanomatériaux. Dans ce cadre le dioxyde de titane fait actuellement l’objet d’une analyse de la meilleure option de gestion des risques dans le cadre de REACH, qui est inscrite au plan d’action d’évaluation des substances de l’ANSES en 2017. L’ensemble de ces mesures nationales et européennes vise à améliorer les connaissances sur les expositions et les dangers potentiels des nanomatériaux, dont le dioxyde de titane, afin de prendre toute mesure de restriction d’usage de ces matériaux qui s’avèrerait nécessaire.