Inquiétudes sur les conséquences de l’utilisation de l’aspartame
La question orale sans débat
Question adressée à Mme la secrétaire d’État chargée de la santé
Mme Patricia Schillinger attire l’attention de Mme la secrétaire d’État chargée de la santé sur l’utilisation de l’aspartame dans les produits alimentaires. Cet édulcorant intense est utilisé dans plus de 5 000 produits à basses calories. Son utilisation serait aujourd’hui mise en cause car elle serait responsable, pour les utilisateurs, d’effets secondaires parfois graves. Les produits contenant de l’aspartame censés être diététiques inondent le marché des produits lights. Par ailleurs, depuis 1995, une série d’études a montré des risques : en 1995, l’étude américaine d’Olney et al., basée sur des données du National Cancer Institute suggérait la première une relation possible entre l’augmentation de la fréquence des tumeurs du cerveau chez l’homme et la consommation d’aspartame aux États-Unis. En 2005, 2006 et 2007, l’European Foundation of Oncology and Environnemental Sciences « B Ramazzini » à Bologne, publiait les résultats d’études chez le rat dont les conclusions évoquaient une augmentation de l’incidence des lymphomes, leucémies et autres types de cancer chez les animaux exposés à l’aspartame. La dernière étude publiée par l’American Journal of Clinical Nutrition menée sur 60 000 femmes enceintes, associe consommation d’aspartame durant la grossesse et risque plus élevé d’accouchement prématuré. En conséquence, elle souhaiterait savoir, d’une part, ce que le Gouvernement entend faire pour que les autorités et agences d’évaluation utilisent la même grille d’analyse pour toutes les études et adoptent une déontologie de l’expertise irréprochable – l’exemple récent du Médiator montre les conséquences d’une carence déontologique d’une agence de sécurité sanitaire – et d’autre part, en vertu du principe de précaution, quelles mesures le Gouvernement entend prendre pour garantir la sécurité des millions de consommateurs utilisant quotidiennement ce produit et, plus particulièrement, celle des femmes enceintes et des enfants.
Réponse de M. le secrétaire d’État chargé du logement
Mme Patricia Schillinger. Ma question porte sur les risques induits par l’utilisation de l’aspartame dans les produits alimentaires.
L’aspartame est un édulcorant intense qui est utilisé dans plus de 5 000 produits bassement caloriques. Aujourd’hui, son utilisation est remise en cause, car l’aspartame serait responsable, pour ceux qui le consomment, d’effets secondaires parfois graves.
Les produits contenant de l’aspartame, censés être diététiques, inondent le marché des produits light. L’aspartame représente environ 90 % des édulcorants et se cache partout : dans les sucrettes, les sodas, les yaourts light, les médicaments, etc.
Depuis des années, plusieurs études ont démontré que la prise d’aspartame pouvait engendrer des problèmes considérables pour la santé.
Si tous les scientifiques ne sont pas d’accord, il n’en reste pas moins que cet édulcorant soulève de nombreuses et légitimes interrogations, car il est de plus en plus utilisé.
Deux études européennes récentes ont mis en cause l’aspartame : l’une, danoise, menée sur 60 000 femmes enceintes, montre que la consommation régulière, à partir d’une fois par jour, de sodas light – contenant donc de l’aspartame – double presque les risques d’accouchement prématuré ; l’autre, italienne, a constaté que des rats exposés à de fortes doses d’aspartame développaient davantage de cancers.
Quant aux autorités françaises et européennes chargées de la sécurité des aliments – l’Agence nationale de sécurité sanitaire, l’ANSES, pour la France, et l’Autorité européenne de sécurité des aliments, l’EFSA -, elles ont estimé que ces études ne prouvent pas l’existence d’un danger réel pour les futures mamans.
Pourtant, le doute est là, les études sont contradictoires, et on peut évoquer, ici, le principe de précaution. La réglementation n’est pas adaptée au doute.
Le Gouvernement vient d’annoncer la création d’une taxe portant sur les boissons à sucres ajoutés, qui épargne donc les boissons contenant de l’aspartame. On peut légitimement penser qu’une partie des ventes de boissons contenant des sucres ajoutés va, du fait de la nouvelle taxe, se reporter sur des boissons édulcorées par adjonction d’aspartame alors même que l’Agence nationale de sécurité sanitaire n’a pas encore livré les résultats de son étude portant sur les risques liés à la prise d’aspartame.
Monsieur le secrétaire d’État, le Gouvernement va-t-il prendre des mesures pour que les autorités et les agences d’évaluation utilisent la même grille d’analyse pour toutes les études et adoptent une déontologie de l’expertise irréprochable ? L’exemple récent du Médiator montre les conséquences d’une carence déontologique d’une agence de sécurité sanitaire.
En vertu du principe de précaution, quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre pour garantir la sécurité des millions de consommateurs utilisant quotidiennement ce produit, plus particulièrement celle des femmes enceintes et des enfants ?
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Benoist Apparu, secrétaire d’État auprès de la ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé du logement. Madame la sénatrice, l’aspartame est un édulcorant intense destiné à être employé dans les denrées alimentaires. Sa dose journalière admissible, ou DJA, est de 40 milligrammes par kilogramme de poids corporel par jour. Il a un pouvoir sucrant environ deux cents fois supérieur à celui du saccharose, et est utilisé pour édulcorer de très grandes variétés de boissons et d’aliments à faible apport calorique ainsi que des médicaments.
Concernant l’information du consommateur, le Conseil de l’Union européenne a adopté, le 29 septembre dernier, le projet de règlement INCO, ou règlement d’information du consommateur, dont la publication devrait intervenir à la fin du mois de novembre. Il y est prévu l’étiquetage des denrées alimentaires contenant de l’aspartame avec la mention « contient de l’aspartame ».
L’aspartame a fait l’objet de plusieurs évaluations depuis sa mise sur le marché. Deux études parues au cours de l’année 2010 et que vous venez de mentionner évoquent un danger potentiel de l’aspartame : une étude épidémiologique danoise de juin 2010, menée auprès de 60 000 femmes enceintes sur la période 1996-2002, montre des données qui suggéreraient que la consommation de boissons rafraîchissantes sans alcool à faible teneur calorique augmenterait le risque d’accouchement prématuré ; une étude italienne de septembre 2010, réalisée chez la souris, présume que les risques de cancer du foie et du poumon augmenteraient chez les souris mâles exposées à des doses élevées d’aspartame.
Afin d’évaluer ces études, l’ANSES s’est autosaisie le 24 janvier 2011 et a publié, le 14 mars 2011, un avis concluant que les deux nouvelles publications n’apportaient pas de base scientifique nouvelle suffisante pour justifier une révision de la DJA établie pour l’aspartame. L’étude danoise nécessite d’être complétée par une seconde étude plus robuste tandis que l’étude italienne comporte de nombreux biais.
En février 2011, l’Agence européenne de sécurité des aliments a également évalué ces deux études et a déclaré qu’elles ne justifiaient pas une révision des évaluations précédentes de l’aspartame ou d’autres édulcorants actuellement autorisés dans l’Union européenne.
En outre, en 2010, l’Agence européenne a établi un programme de réévaluation de tous les additifs alimentaires autorisés avant 2009. La réévaluation des édulcorants devrait être achevée au 31 décembre 2020, sauf pour l’aspartame qui, à la suite de la pression française, se terminera à l’automne 2012.
Par ailleurs, l’ANSES a mis en place en mai dernier un groupe de travail chargé d’évaluer les bénéfices et les risques nutritionnels des édulcorants intenses. Les principaux objectifs de ce groupe sont la réalisation d’un état des lieux des données disponibles, et l’identification des éventuels bénéfices ou dangers nutritionnels liés à ces consommations. Ce travail permettra d’élaborer des recommandations pour des populations sensibles, parmi lesquelles les femmes enceintes.
Cependant, M. Xavier Bertrand et Mme Nora Berra souhaitent que le travail concernant l’évaluation du rapport risques/bénéfices de l’aspartame soit rendu d’ici à la fin novembre 2012. Une saisine interministérielle de l’ANSES est en cours de rédaction.
Les différentes expertises en cours permettront de prendre, le cas échéant, les mesures appropriées pour réduire l’exposition des consommateurs à l’aspartame, notamment celle des populations les plus sensibles.
Mme la présidente. La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Mme Patricia Schillinger. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse, même si elle ne m’a pas vraiment rassurée.
Dans l’attente des conclusions de l’ANSES, à la fin de 2011, le doute reste entier. L’aspartame est largement consommé, surtout par les adolescentes et adolescents, mais aussi par des personnes absorbant des médicaments, lesquels contiennent souvent de l’aspartame.
Beaucoup parlent d’un nouveau scandale comparable à celui du Médiator, et c’est pourquoi je vous alerte, monsieur le secrétaire d’État.
Selon certains films, tels L’Aspartame, un doux parfum de poison et Notre poison quotidien, la mise sur le marché de l’aspartame aux États-Unis, en 1982, ne fut pas exempte de pratiques douteuses. En France, il semble que l’Autorité européenne de sécurité des aliments ait simplement suivi l’avis des instances américaines, sans procéder à de nouvelles études.
De plus, le Corporate Europe Observatory, ou CEO, a découvert que des experts de l’EFSA ont omis de déclarer qu’ils collaboraient activement avec l’industrie alimentaire, dont Coca-Cola ! Je reste donc très inquiète et j’attends le rapport de l’ANSES avec hâte